Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/320

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ques personnes étrangères au parti, que se réunirent, le 5 juin, vers huit heures du soir, plusieurs des républicains les plus influents. Là fut agitée, au milieu de mille rumeurs confuses, la question d’un soulèvement général. Pour beaucoup, la question n’était pas douteuse. L’élan était imprimé au parti : que tardait-on à le seconder ? La révolution de 1830 n’avait pas commencé sous des auspices plus favorables. Tel ne fut pas l’avis d’Armand Carrel. De la part d’un homme réputé brave entre tous, et en présence d’un parti non moins soupçonneux que bouillant, une déclaration pareille demandait une fermeté de caractère peu commune. Mais il est permis d’affirmer qu’Armand Carrel, dans cette occasion, se pressa trop de juger en militaire ce qu’il avait à juger en conspirateur. Or, les principes qui assurent la victoire à une armée en campagne ne sont pas ceux qui décident du succès d’un soulèvement populaire. L’audace, qui fut le procédé de Danton et même son génie, l’audace est la prudence des partis en lutte. Car, en révolution, la confiance a tous les profits du hasard.

La réunion du National n’ayant abouti qu’à mettre en relief des dissidences funestes, les plus ardents se mirent en marche pour gagner le coin de la rue Ménilmontant, où ils se croyaient attendus par de nombreux amis, et où ils étaient résolus à se fortifier, ne doutant pas que la guerre ne recommençât le lendemain.

Mais déjà la face des choses commençait à changer. Le défaut de direction menaçait de tout compromettre. Dans le salon de M. Laffitte, quelques