Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/323

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Boucher, s’élevait la. maison n°30, dont cent-dix insurgés environ occupaient le rez-de-chaussée et les abords, et qui leur devait servir tout à la fois de quartier-général, de citadelle, d’ambulance. La position était bien choisie : si on l’abordait de front par la rue Aubry-le-Boucher, on tombait sous le feu parti des croisées du quartier-général ; si on l’attaquait de revers, il fallait affronter les combattants postés dans l’intérieur des barricades, hommes exercés qui donnaient la mort d’une main sûre et qu’animait un courage extraordinaire. Dans la soirée du 5 juin, une colonne de gardes nationaux, qui éclairait la rue St.-Martin, vint se heurter à la barricade. « Qui vive ? crie la sentinelle. – Amis. Êtes-vous républicains ? – Oui. » L’air fut ébranlé par de-joyeuses acclamations ; et un insurgé, nommé Rossignol, s’avança pour conférer avec le chef de la colonne ; mais, à l’instant même, des gardes nationaux s’élançaient sur la barricade en criant : « ah ! brigands, nous vous tenons enfin » ; et, de son côté, le capitaine se disposait à faire prisonnier le parlementaire. Alors, celui-ci se retourne vers les siens, et quoi qu’un tel commandement semblât l’exposer à une mort inévitable, il s’écrie avec intrépidité : « feu ! mes amis. » Une décharge partit de l’intérieur des barricades et renversa cinq hommes. Les assaillants ayant fait feu à leur tour, un des chefs de la barricade reçut une balle dans les reins ; mais la colonne dut reculer et se dispersa. À cette première rencontre succédèrent deux attaques qui furent repoussées avec beaucoup de vigueur. Et ce n’étaient là que les préludes d’une lutte terrible.