Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/325

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daient qu’on leur fît grâce de la vie. « Ne craignez rien, répondirent en souriant les républicains, nous ne venons ici que comme ennemis du roi ; et si vos meubles sont endommagés par les balles, le gouvernement provisoire vous indemnisera. » Ceux qui avaient des fusils s’embusquèrent à l’angle des croisées ; les autres se tinrent prêts à faire rouler sur la tête du soldat des moëllons et des pavés. Aussi les troupes ne purent-elles que traverser à la hâte les barricades, où leur passage laissa pour tout vestige une longue traînée de sang. Bientôt après, avertis que, dans la cour de la maison par eux occupée, il y avait une boutique d’armurier, les républicains s’en firent ouvrir l’entrée. Cette boutique contenait une cinquantaine de fusils de chasse. La distribution en fut faite au milieu du plus vif enthousiasme ; mais la fraternité qui régnait entre les combattants ne les empêcha point de se disputer ces armes, trop rares, avec toute la jalousie du courage. Sur ces entrefaites, on annonce l’approche de la garde municipale. Alors les insurgés descendent en masse dans la rue, laissent approcher la garde municipale à la portée du pistolet, et la repoussent trois fois de suite au cri de vive la république ! Leur exaltation était immense et semblait croître avec leurs dangers. Un enfant de douze ans qui combattait parmi eux ayant été cruellement blessé à la tête, Jeanne ne put, malgré les sollicitations les plus pressantes, lui faire quitter la barricade. Du reste, ce bouillant courage s’alliait, chez les combattants de Saint-Méry, à un sentiment profond d’humanité. Après chaque en-