Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 3.djvu/99

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tiennent pas ; les capitaux s’engouffrant, sous l’impulsion d’une avidité honteuse, dans les placements aventureux ; tous les intérêts armés les uns contre les autres les propriétaires de vignes contre les propriétaires de bois, les fabricants de sucre de betteraves contre les colonies, les ports de mer contre les fabriques de l’intérieur, les provinces du midi contre celles du nord, Bordeaux contre Paris ; ici, des marchés qui s’engorgent, désespoir du capitaliste ; là, des ateliers qui se ferment, désespoir de l’homme de main-d’œuvre ; le commerce devenu un trafic de ruses permises et de mensonges convenus ; la nation marchant à la reconstitution de la propriété féodale par l’usure, et à l’établissement d’une oligarchie financière par le crédit ; toutes les découvertes de la science transformées en moyens d’oppression, toutes les conquêtes du génie de l’homme sur la nature transformées en armes de combat, et la tyrannie multipliée en quelque sorte par le progrès même ; le prolétaire, valet d’une manivelle, ou, en cas de crise, cherchant son pain entre la révolte et l’aumône ; le père du pauvre allant à soixante ans mourir à l’hôpital, et la fille du pauvre forcée de se prostituer à seize ans pour vivre, et le fils du pauvre réduit à respirer à sept ans l’air empesté des filatures pour ajouter au salaire de la famille ; la couche du journalier, imprévoyant par misère, devenue horriblement féconde ; et le prolétariat menaçant le royaume d’une inondation de mendiants.Voilà quel tableau présentait alors la société.

D’un autre côté, plus de croyances communes,