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Page:Blandy - Le Petit Roi.djvu/55

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M. Carlstone s’inclina, en faisant un geste indécis qui pouvait aussi bien être une protestation contre ces derniers mots de la comtesse qu’une expression de regret.

« Je ne vous cache pas, mademoiselle, continua celle-ci, que j’ai tout intérêt à ce que vous ayez plus de persévérance, car mon fils m’annonce que si vous nous quittez, il viendra prendre Stéphane pour se charger complétement de son éducation. M’enlever Stéphane ! je n’ai plus que lui ! Jugeż de ce que cet enfant doit être pour moi : J’ai perdu trois filles, mon mari, un fils grand et beau, le père d’Arkadi, enfin les trois enfants et la femme de Pavel. Pavel lui-même m’a quittée pour courir le monde, et je serais morte dans mon isolement si je n’avais eu Stéphane. Que de nuits j’ai passées près de son petit lit ! Il a été très-délicat de santé et il l’est encore. Je tremblerais de le savoir livré à son père. Son père l’aime assurément ; mais est-ce que les hommes savent soigner ces chères jeunes créatures ? Mon Stéphane a beau grandir, il me semble toujours que je le porte dans mes bras. Je crois voir revivre en lui tous ceux que j’ai perdus. Oh ! dites-moi, mademoiselle, que vous ne le rendrez pas trop malheureux ! »

Et la comtesse, essuyant d’une main les larmes qui tremblaient au bord de ses paupières, tendit l’autre à Suzanne qui la baisa, tant elle fut émue par cette explosion de sensibilité.

« Madame, lui répondit-elle, je ferai tout ce qu’il me