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Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/398

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CHAMBRES DE COMMERCE — CHAMBRES SYNDICALES, 1-4.
corps tout entier. La loi du 7 septembre 1811 transforma cette institution, mais sans oser toucher aux dispositions essentielles. On y est revenu cinq ou six reprises, avant de supprimer clairement et nettement (L. 24 juin 1861, art. 3, § 4) l’obligation des commerçants de faire partie des « corporations ». On avait craint qu’en rendant aux commerçants la liberté sous ce rapport, le nombre des adhérants diminuerait ; mais jusqu’en ce moment cette crainte s’est trouvée sans fondement. Il y a en Prusse huit villes à « corporation commerciale » (Berlin, Stettin, Magdebourg, Tilsil, Kœnigsberg, Danzig, Memel, Elbing). La ville d’Altona a une institution spéciale mais soixante autres villes ont des chambres de commerce proprement dites.

Chacune des « corporations » a ses statuts, approuvés par le roi et promulgués, non dans le Bulletin des lois, mais dans les Actes de préfecture, pour nous servir d’expressions équivalentes. Les statuts n’ont pas une teneur identique, mais généralement ils admettent comme membre de la corporation tout commerçant à réputation intacte. Le comité directeur est élu par les membres ; tous les frais sont couverts par des cotisations ; les institutions commerciales (et de bienfaisance s’y rattachant) sont administrées par le comité directeur, qui présente à la nomination de l’autorité certains officiers (courtiers, pilotes, etc.) et donne les avis qui peuvent lui être demandés.

Quant aux chambres de commerce proprement dites, la première loi prussienne qui les concerne est du 11 février 1848 ; la loi en vigueur est du 24 février 1870. Les localités qui désireraient posséder une chambre de commerce doivent s’adresser au ministre du commerce. En principe, chaque commerçant est électeur et éligible ; mais, sur la demande des intéressés, le droit électoral peut être rattaché à un cens, à un minimum de droit de patente. Les élections ont lieu sous la présidence d’un commissaire du Gouvernement. Le scrutin de liste est la règle ; mais avec l’autorisation du ministre du commerce, il peut être formé des circonscriptions électorales. Le scrutin est secret, La durée des fonctions est de trois ans ; mais le renouvellement a lieu par tiers, tous les ans. Les fonctions sont exercées gratuitement par les membres. Les chambres peuvent s’imposer sous la forme de centimes additionnels à la patente, mais sans en dépasser 10. Il faut une autorisation (du préfet) pour dépasser 10 centimes. Les chambres doivent publier leur budget, dont le montant peut être réduit par l’autorité supérieure, si les 10 centimes sont dépassés. Tous les ans, les chambres publient un rapport. Les courtiers sont présentés par les chambres, qui administrent aussi les bourses.

En Belgique, les chambres de commerce ont traversé en 1874 et 1875 une véritable crise. Au mois de décembre 1874, un projet de loi fut présenté à la Chambre des représentants demandant la suppression de ces Chambres. C’était le résultat des délibérations d’une commission instituée par arrêté ministériel du 28 janvier 1871. Le ministre dit, dans l’exposé des motifs, que ces chambres ont rendu des services, mais que le Gouvernement n’en a plus besoin. Quand il aura besoin de conseils, il saura bien en trouver. Voici le passage : « Mais est-ce à dire qu’en l’absence de ces corps consultatifs le Gouvernement eût manqué des conseils et des renseignements que les circonstances lui rendaient nécessaires ? Le soutenir, ce serait méconnaître la vitalité du commerce et de l’industrie dans notre pays ; ce serait mettre en doute l’intelligence des hommes qui s’adonnent à ces branches importantes de l’activité nationale… »

Le 9 ou 10 février 1875 le rapport de la commission (ou de la section) fut présenté, on y lit ce qui suit (noue le reproduisons d’après le Nord du 15 février) :

La majorité de la section centrale motive ainsi son adhésion au projet de loi :

« En admettant même que les chambres de commerce n’aient pas été, dans le passé, sans utilité, elles le sont aujourd’hui ; n’étant pas nommées par les commerçants et les industriels, elles ne représentent ni le commerce ni l’industrie ; leurs décisions ne reflètent guère que l’opinion de leurs membres ; elles constituent des corps partiaux, n’agissant ni en vue du bien-être général, ni dans l’intérêt des industries qu’elles devraient protéger ; fréquemment elles ont pris une couleur politique ; leurs rapports annuels, confiés à la rédaction de secrétaires qui souvent n’appartiennent pas même au commerce, laissent beaucoup à désirer ; leurs avis ne sont pas suivis et, du reste, la réforme proposée est recommandée par les principes d’une saine décentralisation. »

À ces considérations, la majorité de la section centrale ajoute celle-ci :

« Les intérêts du commerce et de l’industrie sont aussi variés que nombreux. Il est juste de les laisser se manifester librement au lieu de leur imposer les organes de corps privilégiés, revêtus d’un cachet officiel, et dans lesquels plusieurs branches de l’industrie et du commerce ne comptent aucun représentant. On comprend l’existence de ces corps dans le pays où n’existent ni le droit d’association, ni le droit de pétition. On ne les comprend pas sous notre régime constitutionnel. »

« L’ensemble du projet a été volé par 4 voix contre. 2. Mais, dans les sections, 17 membres l’ont adopté contre 3 et 2 abstentions. C’est assez dire que l’institution des chambres de commerce est dès à présent condamnée. » (C’était l’appréciation du journal, mais il a été mauvais prophète, car les chambres de commerce belges ont été maintenues, seulement leurs membres, au lieu d’être nommés, vont être élus.

En Angleterre, les chambres de commerce sont des institutions purement privées, mais elles ont acquis assez de puissance pour se faire reconnaître. Les membres paient des cotisations. Les chambres de commerce forment entre elles une grande association qui a son agence permanente.

Presque tous les États de l’Europe et de l’Amérique ont des chambres de commerce, et presque partout cette institution est considérée comme un rouage administratif. En Allemagne, en Italie, en Angleterre, aux États-Unis, et ailleurs, les chambres de commerce se réunissent annuellement en congrès et défendent en commun leurs intérêts. Maurice Block.

CHAMBRES SYNDICALES. 1. Associations libres formées entre personnes exerçant la même industrie, le même commerce ou la même profession, dans le but de s’entendre sur les intérêts particuliers et généraux de leur commerce, industrie et profession, et de se fournir mutuellement les renseignements professionnels.

sommaire.

chap. i. caractère des chambres syndicales, 2 à 6.
chap.ii. objet, 7 à 13.
chap.iii. organisation et fonctionnement, 14 à 20.


CHAP. I. — CARACTÈRE DES CHAMBRES SYNDICALES.

2. Les chambres syndicales diffèrent essentiellement des anciennes corporations d’arts et métiers en ce sens que l’adhésion des commerçants et des industriels à ces associations est facultative et que la profession pour laquelle est constituée une chambre syndicale peut s’exercer librement en dehors d’elle. Toutefois, comme ces associations n’ont lieu qu’entre personnes exerçant le même métier, le même commerce ou la même profession et qu’elles ont pour objet l’entente sur des intérêts professionnels communs, elles sont par cela même formellement contraires à la loi du 17 juin 1791.

3. Les chambres syndicales ne sont dès lors susceptibles de recevoir aucune autorisation ni aucune reconnaissance légale. Elles ne subsistent en fait qu’en vertu de la tolérance de l’administration, qui pourrait les dissoudre instantanément par simple mesure de police.

4. Cette tolérance toutefois s’exerce d’une manière assez large ; elle a été en quelque sorte sanctionnée officiellement dans un rapport adressé à l’empereur, le 30 mars 1868, par M. le ministre d’État à l’occasion des vœux exprimés par les délégations ouvrières à l’Exposition universelle de 1867, pour obtenir l’autorisation de former des chambres syndicales d’ouvriers. M. le ministre d’État, tout en reconnaissant que les chambres syndicales ont un caractère extra-légal et que l’administration devait rester, comme par le passé, étrangère à leur formation, a admis que les raisons de justice et d’égalité invoquées par les délégations ouvrières pour former des réunions analogues à celles des patrons étaient dignes d’être. prises en considération. « En adoptant les mêmes règles pour les ouvriers que pour les patrons, dit M. de Forcade dans le rapport ci-dessus, rapport approuvé par l’empereur, l’administration n’aura pas à intervenir dans la formation des chambres syndicales. Elle ne serait amenée à les interdire que si, contrairement aux principes posés par l’Assemblée constituante dans la loi du 17 juin 1791, les chambres syndicales venaient à porter