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AFFOUAGE, 12-18.

12. À la différence de ce que nous avons dit pour les bois de chauffage, l’affouage en futaies peut arrérager, quand il n’y a pas de la faute de l’ayant droit dans l’omission dont il se plaint. Car l’affouagiste omis dans la répartition précédente, qui vient réclamer sa part, ne demande pas, comme dans l’autre cas, qu’on satisfasse à un besoin qui n’existe plus, mais à un besoin qui n’a fait que s’accroître avec le temps. Seulement, il doit y avoir lieu d’appliquer à ce droit d’arrérage la prescription de cinq ans imposée par l’art. 2277 du Code civil : « à tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ».

CHAP. IV. — RÈGLES COMMUNES.
Sect. 1. — Titres et usages anciens.

13. Les titres dont parle la loi sont des actes écrits et authentiques, tels que d’anciennes chartes, des édits et règlements du Conseil du Roi ou des Parlements, des contrats anciens passés entre les communes et des particuliers ou d’anciens seigneurs. Les simples délibérations des autorités municipales ne peuvent constituer des titres ; elles n’établissent que des usages, lesquels, du reste, lorsqu’ils remontent à une date immémoriale et qu’ils ont été constamment suivis, équivalent à des titres et font loi entre les parties prenantes.

14. En 1793, sous l’empire des idées d’égalité absolue qui régnaient alors, la législation s’était proposé d’établir pour le partage de la jouissance, comme pour celui de la propriété des biens communaux, un système uniforme et en rapport avec les principes nouveaux. C’était le partage par tête ; les communes furent autorisées à procéder à l’adoption de nouveaux modes de partage des fruits communaux, par elles-mêmes et sur la simple approbation du directoire de département. Mais dans bien des localités, la loi échoua contre la force de l’habitude, et les usages anciens furent conservés. Aussi le décret du 9 brumaire an XIII crut-il devoir décider que les communes qui, n’ayant pas profité du bénéfice de la loi du 10 juin 1793, avaient conservé le mode de jouissance de leurs biens, continueraient à en jouir de la même manière. Ce mode alors ne pouvait être changé que par un décret rendu sur la demande du Conseil municipal, après avis du sous-préfet et du préfet. Quant aux communes où la loi de 1793 avait été exécutée, et où, en vertu de l’art. 12, section III, il avait été établi un nouveau mode de jouissance, ce mode dut être exécuté provisoirement. Toutefois, les communes purent délibérer par l’organe de leurs Conseils municipaux un nouveau mode de jouissance, qui devait être approuvé, rejeté ou modifié par le préfet en Conseil de préfecture, sauf recours au Conseil d’État. C’est pour revenir aux règles de l’égalité, et non pour ressusciter d’injustes inégalités entre les chefs de ménage d’une commune, que le législateur a admis les changements de mode de jouissance.

15. Sous la législation de 1837, si les communes voulaient changer leurs anciens modes de jouissance, ce droit appartenait aux Conseils municipaux, sous la surveillance et le contrôle de l’administration supérieure, aux termes des art. 15 de la loi du 28 pluviôse an VIII, et 17 de la loi du 18 juillet 1837. Cette dernière disposition est ainsi conçue : « Les Conseils municipaux règlent, par leurs délibérations, les objets suivants… 4o les affouages en se conformant aux lois forestières… »

Toutefois les règlements établis par d’anciens édits ou par des ordonnances royales, ne pouvaient, aux termes du décret du 9 brumaire an XIII, être rapportés ainsi ; il fallait l’intervention du chef du Gouvernement lui-même.

16. Aujourd’hui, quelle que puisse être la nature de l’acte primitif, d’après le décret sur la décentralisation administrative du 25 mars 1852, tableau A, no 40, il suffit d’un arrêté préfectoral ; mais ces arrêtés sont bien entendu susceptibles d’être attaqués hiérarchiquement devant le ministre de l’intérieur, et même d’être réformés d’office. (D. 25 mars 1852, art. 6.)

Toutefois, l’attribution nouvelle conférée aux préfets par décret du 25 mars 1852, ne s’applique qu’aux biens communaux sur lesquels les habitants sont en possession actuelle de la jouissance, et non sur ceux auxquels les habitants d’une section prétendent avoir des droits privatifs irrévocablement acquis, c’est-à-dire des droits de propriétés fondés sur un partage antérieur, fait en exécution de l’édit de juin 1769. Il faut d’abord renvoyer les parties à faire juger, par l’autorité compétente, le mérite des droits des opposants. Ainsi jugé, par annulation de l’arrêté du préfet de la Moselle, du 24 septembre 1852, et de la décision approbative du ministre de l’intérieur du 17 janvier 1853. (Ar. du C. 7 décembre 1854, Guépratte et autres contre la comm. de Cheminot.)

17. Les usages résistèrent à la législation impériale comme ils avaient résisté à la législation révolutionnaire. Le Code forestier consacre tous ceux qui se sont maintenus. Que l’usage soit purement traditionnel, qu’il soit constaté par les registres anciens de la commune, ou consacré par des arrêts de règlement de l’ancien Conseil ou des Parlements, pour qu’il soit admis, il suffit qu’il soit constant, volontairement suivi et immémorial. Nous pensons qu’une interruption momentanée, qui ne serait que le résultat de la législation de 1793, ne devrait pas effacer un usage ancien. Cela résulte évidemment de la substitution, faite par la Commission, du mot usage au mot possession, la possession pouvant être interrompue et l’usage ancien n’en devant pas moins subsister ; mais l’administration n’a pas admis qu’on pût revenir à un usage ancien abandonné de 1793 à 1827. Il a été décidé ainsi relativement à la commune de Bavent (Doubs), « qu’on ne peut revenir à un usage qui avait cessé depuis 1793 jusqu’en 1827, et que dans ce cas, la distribution de l’affouage doit rester soumise aux règles du Code forestier. »

Sect. 2. — Délivrance des coupes.

18. Le droit d’affouage ne s’exerce pas sur l’intégralité des bois communaux ; un quart doit toujours être mis en réserve, à moins que la propriété communale ne soit de moins de dix hectares de bois réunis ou divisés, ou que ces bois ne soient peuplés en totalité d’arbres résineux (Code for. art. 93). Ce sont des décrets qui règlent quelle portion peut être exploitée, quelle doit être mise en réserve. Hors le cas de dépérissement des quarts de réserve, l’autorisation de les couper n’est donnée qu’en cas de nécessité bien constatée. Les coupes ne peuvent