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Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/573

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CONFLIT, 114-119

Mais s’il n’était pas partie en cause, le délai court-il de la date de la signification de l’appel faite par l’appelant à l’intimé, ou bien ne court-il que de la signification de cet appel faite au préfet lui-même ? La première opinion aurait l’inconvénient d’exposer l’administration à voir périr son droit sans qu’elle eût le moyen de l’exercer en effet, l’appel, s’il ne doit pas être signifié au préfet, peut fort bien être ignoré de ce fonctionnaire, surtout pendant le délai fort court que fixe le § 2 de l’art. 8 ; or, ce résultat serait d’autant plus regrettable que la déclaration d’incompétence déjà émanée des premiers juges rend la revendication pius sérieuse et en augmente extérieurement la force. D’un autre côté, obliger l’appelant à signifier l’appel au préfet, c’est aggraver les frais de la procédure, en ajoutant au texte de l’art. 8 une disposition qu’il ne contient pas. Cependant la difficulté a été résolue dans ce dernier sens par le Conseil d’État le 30 août 1847.

114. Cette question n’a pas, au surplus, tout l’intérêt qu’elle paraît avoir car, ainsi que nous l’avons dit et ainsi que le constate M. Boulatiginier (p. 491), les préfets peuvent, au lieu d’élever directement le conflit dans les termes du § 2 de l’art. 8, renouveler d’abord le déclinatoire, non-seulement dans la quinzaine de la signification de l’appel du jugement par lequel le tribunal de première instance s’est déclaré incompétent, mais dans tout le cours de l’instance jusqu’à l’arrêt définitif sur le fond. Si donc un préfet laissait expirer ce délai de quinzaine sans élever le conflit, il pourrait encore revendiquer la contestation, à la condition de proposer un nouveau déclinatoire, tant que les juges d’appel n’auraient pas définitivement statué au fond. Seulement si, plus de 15 jours après la signification qui lui aurait été faite de l’acte d’appel, il élevait directementle conflit, ce conflit devrait être annulé comme irrégulier ; dans l’état actuel de la jurisprudence, la disposition du § 2 de l’art. 8 n’a pas d’autre sanction.

115. Quant à l’appel lui-même, l’art. 8 n’a posé aucune règle particulière il s’est ainsi référé aux formes et délais déterminés par les art. 443 et suivants du Code de procédure, d’où il suit notamment que la partie intéressée a, dans les cas ordinaires, deux mois pour interjeter appel, à dater de la signification qui lui a été faite du jugement. Un temps assez long pouvant s’écouler avant que cette signification soit faite, et le conflit pouvant renaître en appel, la question de conipétence ne recevra peut-être pas toujours une solution définitive aussi prompte que le désiraient les auteurs de l’ordonnance de 1828. Sous ce rapport, il eût pu être utile d’établir un mode particulier de signification des jugements qui admettent ou rejettent le déclinatoire mais il eût fallu concilier ces prescriptions spéciales et d’intérêt public avec le droit et l’intérêt de la partie privée, qui ne saurait être tenue d’interjeter appel qu’autant que la partie adverse, qui a obtenu le bénéfice du jugement, la met en demeure d’acquiescer, à ce jugement ou d’en poursuivre la réformation. Quoi qu’il en soit, l’ordonnance de 1828 a laissé les choses à cet égard sous l’empire du droit commun.

116. L’art. 8, ainsi que nous l’avons dit, prévoit surtout le ca» où le déclinatoire est présenté en première instance. Mais on a vu qu’il peut également être proposé pour la première fois ou être renouvelé en appel, aux mêmes conditions générales qu’en première instance.

S’il est admis par la cour d’appel, cette décision, termine ou plutôt arrête la lutte, quant à la compétence. Il peut arriver cependant que la partie intéressée se pourvoie en cassation et que l’arrêt qui a admis le déclinatoire soit cassé l’affaire est alors renvoyée devant une autre cour à l’état d’appel, et les parties et l’administration se retrouvent, devant cette nouvelle cour, dans la même situation et avec les mêmes droits qu’avant l’arrêt cassé.

117. Si, au contraire, le déclinatoire est rejeté par la cour d’appel, et si le préfet, dans la quinzaine de l’envoi de l’arrêt, n’élève pas le conflit, il n’a plus, comme en première instance, la ressource éventuelle de l’élever encore devant une autre juridiction il n’a du moins cette ressource qu’autant que, sur le pourvoi en cassation formé par l’une des parties, l’arrêt viendrait à être cassé et les parties renvoyées à une autre cour. Mais, à ce sujet, une hypothèse assez délicate s’est présentée devant le Conseil d’État. Par suite de la cassation d’un arrêt, l’affaire avait été portée devant une autre cour ; là le préfet, usant pour la première fois de son droit, propose un déclinatoire, et la cour rend un arrêt par lequel, en même temps qu’elle rejette le déclinatoire, elle renvoie la cause et les parties, sur le fond, devant un tribunal de première instance autre que celui qui avait déjà connu du procès. Le préfet n’élève pas le conflit dans la quinzaine de l’envoi de cet arrêt mais il propose un nouveau déclinatoire devant le tribunal saisi du renvoi, et ce déclinatoire ayant été rejeté, il élève le conflit. Ce conflit était-il recevable ? Pour la négative, on argumentait des termes des art. 8 et 11, qui en effet semblaient imposer, dans ce cas, l’obligation de le présenter, à peine de nullité, dans le délai que le préfet avait laissé expirer. Mais, en sens contraire, on répondait qu’en principe le conflit peut être élevé tant que l"autorité ! judiciaire n’a pas définitivement prononcé sur le fond de la contestation on ajoutait que la déchéance établie par l’art. 11 s’applique seulement au cas où le préfet voudrait, après le délai de l’art. 8, élever le conflit devant le tribunal saisi de l’affaire, c’est-à-dire devant le même tribunal, et qu’en fait telle n’était pas la situation. Cette dernière interprétation a prévalu. (15 dêc. 1853.)

ART. 2. FORMES DE LA RÉDACTION DU CONFLIT ; INSERTION TEXTUELLE DES LOIS INVOQUÉES.

118. La forme de la rédaction du conflit est, en partie, réglée par l’art. 9 de l’ordonnance, ainsi conçu :

« Dans tous les cas, l’arrêté par lequel le préfet élèvera le conflit et revendiquera la cause, devra viser les jugements intervenus et l’acte d’appel, s’il y a lieu la disposition législative qui attribue à l’administration la connaissance du point litigieux y sera textuellement insérée. »

119. « La partie la plus importante de cet article, dit M. Taillandier (p. 167), est celle qui