Page:Block - Dictionnaire général de la politique, tome 2.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

paste pouvoir entre deux extrémités constantes entre lesquelles une ligne intermédiaire puisse être mathématiquement déterminée. Aussi la modération d’une époque peut-elle être quelquefois la violence d’une autre les lois pénales, par exemple, qui ne semblaient que justice à nos pères, nous parattraient barbarie. La révolution française qui a offert tontes les leçons de la politique, a présenté dans son cours des situations successives dans lesquelles ce qui était extrême devenait postérieurement modéré, et réciproquement. Les meilleurs esprits ont pensé, comme Mirabeau, que )’Assemb)ée constituante, en sortant de l’ancien régime, aurait dû s’arrêteren deçà de la Constitution de 1791. 1. Plus tard, iorsque ceife-ci fut battue en brèche à la fois par l’exagération du radicaiismc girondin et la violence subversive du jacobinisme naissant, elle devint l’asife et le symbole des opinions modérées ; lorsqu’elle eut péri, ces mêmes girondins élevèrent le drapeau de la modération contre les jacobins, et c’est autour des premiers que durent se ranger les amis de la justice et de l’humanité. Survinrent ensuite des temps tellement désespérés que Danton parut modéré auprès de Robespierre, et Robespierre auprès d’Hébert et de ses pareils. Puis en sens inverse, le Consulat lit succéder un régime de modération politique et un despotisme tempéré aux excès alternatifs de viotcnce et de faiblesse du Directoire et l’Empire, outrant le Consulat, en perdit de jour en jour les mérites relatifs, et donna le plus mémorable exemple des calamités qui suivent ta domination sans contrôle d’une volonté tonte-puissante. Ainsi celui qui entre 1789 et t8t4 aurait vouludans la vie publique garder constamment le milieu, aurait été constamment obligé d’en changer la place, selon que tout se rapprochait, pour parler comme Tacite, de ~M :d :</<tmMM M libertate, ou g !M~ tM servitute. (Agric., H.)

Si l’on ne consulte que la prudence et les chances de succès, on ne trouvera pas moins de restrictions à la doctrine du juste milieu Le principe d’Aristote, dit un homme d’Etat anglais, ne saurait être d’nne application nniverselle ; cardans certains cas, le parti extrême peut être le meilleur. Entre l’inaction, une petite guerre et un effort militaire où une nation déploie toutes ses ressources, le dernier procédé peut être le plus sage. Si une extension des droits politiques est demandée et qu’il y ait à choisir entre un refns absolu, une concession partielle et une concession entière, celle-ci peut être le moyen le plus raisonnable de régler la question d’nne manière durable. Toutefois il est possible qu’une marche intermédiaire soit souvent la seule qu’on puisse smTK avec sûreté. Dans les cas mêmes où en principe fabsolu serait préférable, les habitudes et les intérêts existants, l’état de l’opinion publique peuvent rendre expédient de recourir à quelque tempérament, à quelque procédé moyen. De là l’avantage des compromis en politique. c’est ainsi qu entre deux intérêts rivaux, en lutte sur la fixation d’une taxe, l’un demandant qu’on l’élève, l’autre qu’on l’abolisse, on peut les amener à transiger par l’étabjissement d’un droit modéré. Les compromis sont inadmissibles, lorsqu’un principe doit être maintenu et qu’une concession partielle serait une capitulation qui emporterait la questiou tout entière. Ainsi il peut arriver que ne pas soutenir un droit national, méuie pour un temps, revienne à l’abandonner. ),e choix de la via media, souvent hautement salutaire, doit donc se faire avec discernement, car quelquefois le succès ne peut être espéré que de l’un ou de l’autre des extrêmes, et la tentative de partager les avantages de tous deux n’aboutit qu’à perdre les bénéfices de l’un et de l’autre." (Gcorge Lewis, N~o~e f !’o&~-c. e~eraMOHM<’Hie ;:<e) :poh’<Me,XXt !, G.) Ces paroles sont remarquables, écrites par un ministre daus un pays où, comme le dit Macaulay, savoir compromettre ou transiger a toujours passé pour le fond de science du gouvernement mais elles rendent, il faut l’avouer, obscure et épineuse la question de savoir ce qu’il faut entendre par juste milieu, et comment doit être définie la modération politique. Il est peut-être impossible d’enfermer tous les cas dans une formule invariable. et le recours déSuitif, le guide suprême est encore, comme du temps d’Aristote, !a droite raison. Dans toutes les questions de l’ordre mora !, et les questions politiques sont généralement de cet ordre, il n’y a guère

finalement d’autre solution. L’autorité de la raison est absolue, en ce sens qu’elle est la seule légitime, et que toute autre est usurpée ; mais ce qu’elle commande ne peut être absolument exprimé. C’est dans l’examen des faits et des circonstances, que le parti le plus sage se manifeste à la raison comme le plus juste à )a conscience. L’une et l’autre est intuitive l’une et l’autre oblige l’esprit et la volonté, et tonte tentative d’énoncer les conditions générales auxquelles une manière d’agir est juste on sage, aboutit le plus souvent à une tautologie : Mais il reste vrai d’une vérité expérimentable que nos passions, celles qui viennent de faiblesse, comme celles qui viennent de violence, inclinent vers les excès et que la vertu qui n’existe pas sans l’empire sur les passions, est essentiellement modérée. L’expérience témoigne également qu’en toutes

choses l’excès est dangereux, et que le bien matériel, comme le bien moral, s’obtient par une certaine mesure entre le trop et le trop peu. On peut donc conclure que dans la pratique l’absolu ne doit pas être séparé du relatif ; un gouvernement mixte est préférable au gouvernement simple ; la politique des passions et, par conséquent, des excès doit le céder à ia politique de la raison, par conséquent, à la politique modérée, et entre le despotisme et la licence, la témérité et la timidité, la violence et la faiblesse, il existe nn point intermédiaire qui, pourvu qu’on se souvienue que ces divers couples de points extrêmes, étant toujours relatifs, sont toujours variables, peut être appelé un juste milieu. Il est dit ~M~