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Page:Block - Dictionnaire général de la politique, tome 2.djvu/178

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L&MAISHE. La religion des Tibétains, qui est aussi celle des Mongols et, sous une forme très-peu différente, celle du Boutan, est appelée par les Européens lamaïsme, du mot lama. titre des hauts dignitaires du sacerdoce chez ces peuples. Elle est un bouddhisme corrompu par une fonle d’éléments hétérogènes. Apportée dans le Tibet, au milieu du septième siècle, à la fois de la Chine et du Népal, la doctrine du Bouddha s’y répandit avec les altérations qu’eUe avait subies dans ce dernier pa~ s, où elle avait été mèlée avec le culte impur des personnifications du principe femelle. tel qu’il il se montre dans le sivaïsme. Ce bouddhisme des Tantras, livres dans lesquels, d’après E~gune Burnouf, les éléments purement bouddinques sont à peine sensibles, reçut de nouvelles altérations dans le Tibet, où il ne put se propager qu’cnfaisant des concessions auxcroyanccs superstitieuses qui y étaient établies. La rdigion antérieure des Tibétains ne consistait qu’en des pratiques magiques par lesquelles les prêtres conjuraient l’action malfaisante des esprits de l’air et des montagnes Ce grossier schamamsme qui se maintient encore dans quelques vallées reculée.’ du Tibet inférieur, laissa de fortes empreintes dans le bouddhisme tibétain. Les saints personnages de la légende de ce pays tiennent toujours par quelque côté du sorcier, et les habitants du Tibet, de la Mongolie et du Boutan n’ont jamais cessé de redouter la maligne inunence des esprits. Cependant de bonne heure et à diverses reprises on tenta d’introduire des réformes dans la religion tibétaine. Elles avaient pour but d’y remplacer le bouddhisme des Tantras par celui des Soufras. Le principe de ce mouvement partait sans doute des couvents bouddhiques de la Chine, dans lesquels était professée la doctrine du Mabâyâna (le grand véhicule). Pendant longtemps ces tentatives échouèrent mais à la fin dn quatorzième siècle la réforme fut décidément accomplie par Tsong-Kha-Pa, religieux, ué vers 1330 dans la contrée d’Amdo, au sud du Konkou-Noor. et mis, aussi bien dans le Tibet que dans la Mongolie, presque Sur la même ligne que le Bonddha. Le but dn réformateur fut sans le moindre doute le rétablissement dn bouddhisme primitif, mais il manquait des connaissances nécessaires pour retrouver l’œnvre dn Bouddhasons tes nombreuses couches d’interprétations dont elle avait été successivement recouverte. Il S’arrêta à la doctrine dn Mahàyâna qu’il prit pour le bouddhisme primitif, et il s’attacha à faire disparaître les pratiques magiques dérivées des Tantras et des anciennes superstitions tibétaines, et à rétablir lascétisme qui est L

bien eu réalité un des traits saillants et authentiques du pur bouddhisme.

Sur le premier point, il n’obtint que des résultats incomplets. La pratique de la mfgic ~ut restreinte ; elle ne fut pas abolie. li est resté dans les couvents les plus considérables du Tibet un devin en titre qui, dans certaines circonstances graves, est chargé onicieHement de prédire l’avenir, de conjurer les é)éments, etc.

Sur le second point, le succès ne laissa rien à désirer. Les pratiques ascétiques constituent la principale affaire dans les couvents, et les religieux sont soumis au célibat, à la confession, à des jeûnes fréquents, à de nombreuses retraites spirituelles.

Le lamaïsme, conforme sur ce point h l’ancien bouddhisme, n’a pas de cierge séculier ; ses prêtres, de tous les rangs, sont des religieux, vivant dans dss couvents (en tibétain 90~0, solitude, mo ?MM~er !fm). Leur nom générique est Ge-sslong (pratiquant la vertu’, nom que leur donna Tsong-Kha-Pa, en leur rendant le bonnet jaune, la couleur distinctive du bouddhisme primitif. Là où la réformation n’a pas pénétré et où s’est maintenu l’ancien lamaïsme rouge, les religieux jouissent encore de la faculté de se marier et de vivre en famille. D’après les prescriptions dn Bouddha, le clergé iamaîque est censé vivre des aumônes des laïques : en réalité il possède des biensimmenses. Les dévots Tibétains ont trouvé dans leur indigence de quoi enrichir les couvents. Le nombre des religieux et des religieuses dans le Tibet doit former environ le cinquième de la population totale, chaque famille consacrant au moins nn de ses enlants à la vie monastique. Nais il fant ajouter que ce clergé n’a jamais abusé ni de sa puissance ni de ses richesses, quoique la vénération qu’il inspire soit poussée jusqu’à l’absurde.

Dans le principe, les couvents étaient indépendants les uns des autres. Au onzième siècle, le supérieur de Sa-Khya, un des plus riches monastères, prétendit à la suprématie. U trouva un puissant antagoniste dans le grand lama du couvent de Bri-goung. Le premier en ayant appelé à arbitrage de l’empereur de la Chine, celui-ci ne manqua pas de lui donner gain de cause, et malgré les protestations des lamas de Bri-Goung, ceux de Sa-Kbya, gràce à la protection du gouvernement chinois, habile à profiter de cette occasion d’intervenir en protecteur dans les affaires du Tibet, restèrent, jusqu’à l’époque de la réformation, les souverains pontifes dans l’Église lamaïque. Tsong-Kha-Pa leur enleva cette dignité suprême. A sa mort, il légua le gouvernement