Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/208

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pas que les ouailles de leurs pâtis s’en aillent brouter dans le bleu des cieux…

On est forcé de ressasser fastidieusement ces observations et de les fixer en soi jusqu’au plus intime, si on veut arriver à concevoir seulement l’énoncé du déconcertant prodige que voici :

Un homme se présente au seuil de l’Église éternelle du Christ, je ne dis pas le plus grand, ni le meilleur, mais l’unique, absolument, celui qu’on était las d’espérer ou de rêver depuis des siècles, un POÈTE CHRÉTIEN.

Ce minable claquedent, dénué même des tessons de Job, porte son fumier sur son esprit et sa besace autour de son cœur. Il s’agenouille à l’entrée du vieil habitacle de l’Espérance, de l’antique vaisseau des Extases, et, du fond de sa conscience, invoque le Dieu flagellé pour qu’il soit le témoin de son holocauste.

Il arrive des lointains cloaques, apportant l’inégalable trésor des puanteurs, des nudités, des dérélictions, des blasphèmes et des désespoirs du siècle, puisque l’Épouse indéfectible du Rédempteur a reçu le pouvoir de transfigurer tout cela. Il a choisi d’être le bouc propitiatoire et le sacrifice qu’il offre est cousin germain de l’effroyable désolation qu’il assume.

Sacrifier à Jésus la richesse, la célébrité, l’amour même, c’est le vieux jeu des martyrs et des confesseurs nimbés qu’on vénère dans les basiliques et dont les histoires sont écrites par des professeurs de vertu. Mais sacrifier à cet