Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/245

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Instinctivement, on se défiait d’un nécessiteux qui voyait le soleil en plein midi. Cela ne pouvait s’expliquer que par quelque crime exceptionnel, quelque sacrilège sans nom qu’il expiait de la sorte, et les parents le montraient de loin à leur géniture comme un témoignage vivant des redoutables sentences de Dieu.

On avait même eu peur, un instant, de la contagion, et le curé de la paroisse avait été sur le point de l’expulser. Par bonheur, un groupe de savants honorables, dont la compétence ne pouvait être mise en doute, avait déclaré, non sans aigreur, mais de la façon la plus péremptoire, que « ça ne se prenait pas ».



Il vivait donc chichement de rares aumônes et du maigre fruit des travaux futiles où il excellait.

Il n’avait pas son pareil pour enfiler des aiguilles. Il enfilait même des perles avec une rapidité surprenante.

Personnellement, je me vis forcé, naguère, de recourir à lui, plusieurs fois, pour déchiffrer les œuvres d’un psychologue renommé qui avait adopté l’usage d’écrire avec des poils de chameau fendus en quatre.

C’est ainsi que nous nous connûmes et que se forma l’intimité regrettable qui devait, un jour, me coûter si cher.