Page:Bloy - Histoires désobligeantes.djvu/246

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Dieu me préserve d’être dur pour un pauvre monstre qui, d’ailleurs, est heureusement enterré depuis longtemps. Mais on juge combien dut être néfaste sur ma jeune imagination l’influence d’un particulier qui m’enseigna le secret magique — oublié depuis tant de siècles — de distinguer un lion d’un porc et l’Himalaya d’un cumul de bran.

Cette science dangereuse a failli me perdre. Peu s’en est fallu que je ne partageasse le destin de mon précepteur. J’en étais arrivé à ne presque plus tâtonner. Ce mot-là dit tout.

Mon étoile bénigne, grâce au ciel ! me sauva du gouffre. Je pus me dégager peu à peu de cet ascendant funeste, rompre définitivement le charme et faire encore une assez bonne figure parmi les taupes et les quinze-vingts qui jouent entre eux le colin-maillard de la vie.

Mais il était temps, rien que temps, et je fus réduit à payer d’une partie considérable de mes revenus la dextérité fameuse d’un oculiste de Chicago qui m’opéra définitivement de la lumière.



Cependant je voulus savoir ce que devenait le mendiant terrible, et voici très exactement sa fin.

Quelques années encore, il continua sa mendicité de clairvoyant à la porte de la cathédrale. Son mal,