Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/333

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goujatisme dissimulé. Cette guenon ne te parlait-elle pas tout à l’heure de son chapelet qu’elle prétend réciter sans cesse, parce qu’elle a vu ici deux ou trois images religieuses. Je voudrais bien le voir, cet objet de sa piété. J’avoue que je ne l’imagine pas très bien sur cette devanture de farceuse. Pourquoi ne les jetterais-je pas tout simplement à la porte quand ils reviendront ? Qu’en penses-tu, chère amie ?

— Je pense que cette femme n’a peut-être pas menti et que tu n’as pas cessé d’être un violent, mon Léopold. Ces gens-là, j’en conviens, ne me plaisent guère. Qui sait pourtant ? Les connaissons-nous ?

Léopold ne répondit rien, mais il était au moins évident que le doute charitable insinué par sa femme n’entrait pas en lui. Celle-ci n’insista pas et tomba elle-même dans un silence triste, comme si elle avait vu passer de sombres images.


XVI



Le lendemain, sur un coup de sonnette des plus énergiques, Léopold, ayant ouvert la porte du jardin, vit paraître Madame Poulot complètement ivre. Impossible de s’y méprendre. Elle soufflait l’alcool et se cramponnait pour ne pas tomber. Sans rien dire, il referma impétueusement, au risque d’envoyer rouler la pocharde, et revint vers Clotilde qu’il trouva tremblante. Elle avait tout vu de loin et était très pâle.

— Tu as bien fait, dit-elle. Tu ne pouvais faire autrement.