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Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/48

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VI



Gémissante, elle s’était dressée dans les ténèbres. Elle devenait folle d’angoisse, quand cette idée reparaissait avec précision.

Son aventure avait été d’une banalité désespérante. Elle avait succombé, comme cent mille autres, à l’inamovible trébuchet de la séduction la plus vulgaire. Elle s’était perdue simplement, bêtement, avec un Faublas de ministère qui ne lui avait rien promis ni rien donné, pas même le plaisir d’une heure, et dont elle n’avait elle-même rien espéré ni rien attendu.

La vérité crucifiante, c’est qu’elle s’était livrée à un bellâtre quelconque, parce qu’il s’était trouvé sur son chemin, parce qu’il pleuvait, parce qu’elle avait le cœur et les nerfs malades, parce qu’elle était lasse à mourir de l’uniformité de ses tourments et, probablement aussi, par curiosité. Elle ne savait plus. C’était devenu tout à fait incompréhensible.

Et quelle odieuse platitude en cette intrigue de stations d’omnibus et de restaurants à prix fixe ! Sa meilleure excuse, peut-être, avait été, — comme toujours, hélas ! — l’illusion facilement procurée à une fille si malheureuse par un homme bien vêtu et dont la politesse paraissait exquise, — mirage de vie supérieure qui, pendant une minute, alla jusqu’à l’éblouissement.

La liaison avait duré quelque temps et, par noblesse de