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Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/248

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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

ot de pensée à toutes ces belles âmes, va jusqu’à soutenir avec le pasteur William Robertson que si Colomb n’avait pas existé, l’Amérique n’en aurait pas moins été découverte, ce qui réduit le Mandataire de Jésus-Christ aux humbles proportions d’un inventeur quelconque qui découvre une force motrice en faisant bouillir son pot-au-feu. Cela n’est pas idéal, sans doute, mais comme ce théologien confond absolument l’idéal avec le surnsturel et même avec le fantastique et que, d’ailleurs, il est infaillible, on ne peut guère espérer qu’il sesouviendra du surnaturel quand il a si formellement déclaré la guerre à tout idéal. D’ailleurs, la science moderne, fort peu éprise du surnaturel, est pour lui. Cette science qui ne croit pas plus à la mission divine de Colomb qu’à celle de Jeanne d’Arc ou de Moïse et qui pense qu’on découvre des âmes avec des boussoles, ne doute pas queles progrès de l’art nautique n’eussent amené infailliblement la découverte du Nouveau Monde. C’est l’opinion de l’illustre Prussien Humboldt et du grand géographe Babinet, lesquels ont délivré, en bonne forme, un certificat d’ignorance au Révélateur de la Création.

Le premier le déclare « dépourvu de toute culture intellectuelle… dénué d’instruction, étranger à la physique et aux sciences naturelles… peu familier avec les mathématiques[1] ». Le second prend en pitié son ignorance sur les questions cosmographiques ; le juge plus arriéré qu’on ne l’était au temps d’Alexandre le Grand, et trouve « Aristote beaucoup plus avancé cn géographie que Christophe Colomb[2] ».

  1. Humboldt. Cosmos, t. II. pp. 320 et 337.
  2. Babinet. Influence des courants de la mer sur les climats.