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Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/33

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HISTORIQUE DE LA CAUSE

Cette majestueuse personnalité de l’Inventeur du Nouveau Monde passait dans l’histoire comme une illustration scientifique de moyenne grandeur que ne déparaît pas le voisinage de Bernard de Palissy ou de Benjamin Franklin. La découverte de la moitié de la Terre était devenue, après trois cents ans, quelque chose comme une anecdote instructive dans les manuels populaires de la science pour tous et dans les récréations historico-littéraires de l’attendrissante Morale pratique. Les imperturbables synopses universitaires mentionnaient simplement qu’une fois, à telle date, un pilote génois qui cherchait on ne sait quoi, découvrit, par hasard, l’Amérique, et c’était tout. Le Dragon de l’enfantillage moderne avait ouvert sa gueule de papier sur le plus énorme événement de l’histoire et l’avait irrémédiablement englouti. Mais il arriva qu’un beau jour, cet événement lui déchira ses ridicules entrailles et rejaillit d’un seul coup dans le ciel. La mystérieuse Providence qui ne connaît point de hâte et pour laquelle il n’est jamais trop tard, avait laissé ramper et baver pendant près de quatre siècles sur la mémoire de son Messager tous ses obscurs et croupissants blasphémateurs.

Quand le moment fixé par Elle et connu d’Elle seule fut arrivé, il ne resta plus rien d’auguste sous le ventre des reptiles, le Serviteur de Jésus-Christ étendit sur les plus nobles fronts ses mains miraculeuses et l’apothéose commença.

Le grand Pape Pie IX, le premier, le seul de tous les Pontifes romains qui ait visité le Nouveau Monde, profondément frappé du rôle providentiel de Christophe Colomb et magnifiquement impatient de la gloire de