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Page:Bloy - Le Révélateur du globe, 1884.djvu/60

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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

Babélique remontât à des temps extrêmement anciens, il avait dû se conserver parmi eux comme un indéterminable fl de lumière, d’une ténuité et d’une pâleur infinies ; et Dieu, qui connaît les pauvres cœurs qu’il a créés, sait bien que c’en était assez pour que ces abandonnés désirassent ! Mais que désiraient-ils ? Ils ne le savaient point. Une sorte de tradition antique parlait seulement d’hommes extraordinaires qui devaient venir du côté de l’Orient et qui changeraient toutes choses dans leur patrie. Encore cette attente sourde et muette leur donnait-elle plus de crainte que de joie. C’est à cela que se réduisait pour eux le « Veniet Desideratus » du prophète Aggée.

Le grand oratorien anglais, le P. Faber, fait remarquer comme une chose étrange qu’il y eut sept jours pendant lesquels Notre-Seigneur n’eut pas de nom[1]. Cette genèse du Nom redoutable qui fait tout fléchir dura plus de deux fois sept siècles pour les Américains et, certes, on peut bien dire sans abuser de la Parole trois fois sainte que c’est surtout pour eux que Jésus-Christ a été vraiment « pontife des biens futurs », appellation divine que saint Paul, d’ailleurs, déclare ininterprétable, à cause, dit-il, de notre imbécillité[2]. Le Christ, dont Tertullien nous assure que toute âme humaine porte en soi le pressentiment et le témoignage, était donc, pour ces délaissés, un Dieu perpétuellement anonyme qui n’aurait pu que les accabler de l’énigmatique et dérisoire litteralité de ses promesses !

  1. De Noël à la Circoncision.
  2. Hebr. V, II ; IX, II.