Page:Bloy - Le Sang du pauvre, Stock, 1932.djvu/210

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colossale de l’ancien peuple de Jéhovah, l’âme universelle de Rosenfeld apercevait d’autres infortunes et ne se cachait pas d’en avoir le cœur déchiré. Il avait été si bien placé pour les connaître ! On l’avait vu travailler parmi les plus pauvres ouvriers de toutes les nations, à Amsterdam, à Londres, à New-York où, pendant dix ans, il n’eut d’autre moyen d’existence que le triste métier d’ouvrier-tailleur de fabrique. Ses vers sur l’esclavage infâme des fabriques sont peut-être les plus douloureux.

Abruti par le travail de la journée, l’ouvrier retourne chez lui. Sa femme et son enfant l’attendent :

 
Le travail me chasse tôt du logis
Et ne me laisse revenir que tard.
Hélas ! ma propre chair m’est étrangère !
Étranger le regard de mon enfant !


Sa femme lui parle de leur enfant. Il est sage et toute la journée ne demande que son père. Mais maintenant il dort. Le pauvre homme s’approche du berceau de l’enfant. Il lui tend un petit sou et lui parle pour le réveiller, pour se montrer à lui.