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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

sais comment elle s’acquiert aujourd’hui, la notoriété ?… Le premier savetier venu fait un pari après un verre d’absinthe et part le lendemain pour les antipodes. Au retour, il écrit qu’il a usé 300 paires de bottes dans son voyage, qu’en évaluant l’épaisseur de ses semelles à 5 millimètres cela représente au total le cuir d’un troupeau de 15 vaches… Et voilà comment on devient l’homme du jour ! Trop vieux, mon cher, les romans de voyage ! C’est passé de mode comme les crinolines. Il n’y a plus rien à faire avec ça !

— Je te comprends, fit Gilbert. Tes raisons ne sont que des prétextes pour excuser ton dégoût de toutes choses et ta distraction à une seule. Quand tu veux écrire l’Italie, ou la Perse, ou les Indes, ta pensée voyage en pleines Laurentides. Quand tu veux faire parler la Persane, la Canadienne, jalouse peut-être te chante dans les oreilles à t’en faire éclater les tempes. Tu n’écriras jamais le commencement, la suite et la fin de ce voyage-là. Ce qu’il y a de plus clair, c’est que tu perds ton temps.

— Tu exagères, mon ami ! J’ai l’esprit rempli de pensées et ce que je pense est infiniment plus