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LE SORCIER

n’était pas un pratiquant[1] ; il ne se confessa à personne, nul ne le vit communier ; mais il aimait rendre un étrange hommage à l’Église. Ses sabots claquaient en ironiques gifles d’une main de bois sur les dalles ; il traversait tous les rangs distraits des fidèles et s’installait non sans une humble arrogance à la table de communion ; malicieux se plaisait-il à une comédie hypocrite ? Au fond, il ne cherchait peut-être, à l’instar de certains adeptes dévoyés, qu’à résorber l’attention des badauds.

Quel sentiment il avait du décorum dans l’ignoble ! un beau jour, il brûla le plancher du premier étage en sa masure, prétendant qu’il fallait vivre sur la terre, immédiatement : « Celui qui est abaissé sera seul élevé, » répétait-il. Son rez-de-chaussée volontaire lui faisait-il espérer l’exaltation des suprêmes étages du ciel ? Il avait fini par coucher dans une caisse en forme de cercueil, à même la boue et les ordures. Ce qui ne l’empêchait pas de se croire un « type » exceptionnel. « Mille visages ; mille indifférents, s’écriait-il encore ; moi j’ai le visage de Chavat ! » On le trouva mort un soir dans son lit de bête, et on l’enterra avec ses guenilles, avec ses instruments, comme un fauve dans sa fourrure, comme un guerrier celtique à côté de ses armes.

  1. En Bretagne, les sorciers modernes racontent que, s’ils vont à la messe, ils perdent leur pouvoir.