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LES MESSES NOIRES

Ne serait-ce pas la Montespan ? Elle n’a point parlé à la vicieuse fillette, enfant de la magicienne qui ouvrit discrètement et salua très bas ce masque impatient et parfumé… Au fond d’un jardin, loin des bruits et des distractions, un pavillon tendu de noire étoffe. C’est là. Une hâte convulsé les lèvres du masque : « Malheur à Lui s’il résiste… mort à Elle… je serai reine. » Elle déchire sa robe, avec l’emphase des anciens prophètes qui — au nom de Dieu, non pas comme elle au nom du Diable — mettaient en pièces leurs vêtements. Ah, la Voisin, l’affreuse sorcière, élève de Brinvilliers, doit l’avoir reconnue. Certes une telle créature, qui la comparerait à ces trop timides ou moins belles sacrilèges, n’osant se livrer toutes, et, hypocrites ou demi-consentantes, s’étriquant seulement à un retrousis jusqu’à la gorge irritée ? Non, celle-là risque tout, voulant tout ; et elle y met cette fougue, cette sincérité dans l’atroce dont ne disposent point les coquettes curieuses, se faisant dire une petite messe niaise sur un bout de peau comme on ne demande, par économie, à la somnambule, que le « petit jeu ». Sa chevelure flambe. D’un seul élan, elle s’est étendue, impudiquement fière, sur le grossier matelas recouvert de ce drap sombre qu’on jette sur les cercueils ; sa tête pend, soutenue d’un oreiller, contre une chaise renversée ; les jambes au dehors glissent et comme un monticule de chair, le ventre saillit, plus haut que la gorge, capital, divin.

Le prêtre la regarde, tranquille, avec cette sorte d’indifférence des horribles sacrificateurs, lorsqu’ils n’ont pas encore pour tenailler leurs nerfs l’ivresse du sacrifice. Lumineux dans le noir du masque, les yeux de l’autel vivant fixent le prêtre : « Tu vois bien, vieux Guibourg, tu