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LE SATANISME ET LA MAGIE

L’existence des saints et des saintes se hérisse de l’assaut dérisoire et criminel des larves. Frappées, liées, traînées par les cheveux, fracassées avec une frénésie telle contre le sol et les murs qu’on les dirait choisies par quelque sournois géant comme massues, les Saintes, à la cuisine, à l’église, au lit, sentent le piétinement de ces furibondes qui tantôt mordent, tantôt, plus atroces, lèchent. Troupeau qui fait trébucher le corps ne pouvant culbuter l’âme, hurle des vomissements de syllabes, brise les meubles, empeste d’une odeur anticipée de cadavre la victime résistante[1]… puis c’est encore — car la grâce peut céler l’ignominie — un bel enfant serrant contre sa blancheur nue une croix de roses, promesse de blandices et de voluptés morbides qui, souriant, s’accroupit au pli du drap râpant l’ascétique cuisse[2].


La hantise de ces fantômes déséquilibra bien des cerveaux indomptables. Paracelse, adepte illustre, couchait toujours avec un sabre de bourreau dans son lit. Parfois, au milieu de la nuit, il s’éveillait, redoutant au détour d’un cauchemar l’embuscade hostile. Alors il se dressait, épimane. L’arme au poing, il fourrageait l’atmosphère, peuplée de menaces ; bientôt, épuisé de fatigue, il s’arrêtait le front en sueur, ne découvrant plus autour de lui que têtes, bras ou jambes fluidiques, délabrés et pourfendus, un sang magique et douloureux.

Parfois les larves l’emportent, jusque dans la maison de Dieu. La légende nous a conservé les mésaventures d’un prêtre qui en était venu à ne pouvoir prononcer le saint

  1. Sainte Françoise Romaine.
  2. Marie de Moë, 1830-1833. (Voir aussi le chapitre sur l’Incubat.)