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L’ENVOUTEMENT D’AMOUR

des abominables drogues, que dispensent nos ordonnances, je crois que notre débauche chimique a plus contribué à détruire les organismes, à précipiter les dégénérescences, que toutes les guerres, toutes les misères, les incurables maladies du moyen âge. Cet historien, qui délire devant ces infectes potions, va jusqu’à féliciter la sorcière faisant manger des excréments à la grande dame, aux seigneurs ses amants, sous prétexte de leur infuser l’amour. Ce philtre ne me déride même pas ; tout au plus, j’y vois le symbole des turpitudes charnelles, de la coprophagie, aboutissement logique de qui adora les organes par où l’humanité se débonde. Plus avisé, Jean Wier ne veut voir qu’âmes pourries en cette manie de l’ordure.

Nous avons connu une vieille, laquelle non seulemeat enchanta par boissons amoureuses, trois abbez consécutifs ; mais aussi les fit mourir, et mit le quatrième hors de son sens. Encore n’a-t-elle point de honte de confesser en public, qu’elle a faict cette meschanceté et fait encore, et que les abbez ne se sont pu retirer de son amour, pour autant qu’ils avaient mangé autant de sa fiente que son bras étoit gros…

Quant à moi, j’ay bien opinion que la fiente que elle disoit leur avoir fait manger, n’estoit autre chose que les ordes voluptez, lesquelles ces moynes, comme souillez en un bourbier, avoyent souventes fois expérimentées avec cette vieille exercitée en cest affaire et par lesquelles aussi ils estoyent tellement alléchez, comme par une ensorcellerie et empoisonnement, qu’onques ils ne peurent désister et rentrer leur bon sens. Voilà ce breuvage amoureux, voilà les ordures qu’avoient mangé aussi gros que le bras.

Avant de terminer, laissons encore la parole aux vieux auteurs ; langage naïf, leur cerveau simple savent noter bien mieux que nous ces gauches enchantements. D’ailleurs, ils y étaient plus experts, aussi bien pour les analyser que pour les combattre.