à retordre, du fil de fée et de nécromancienne. « Les arbres morts », « les durs cailloux » (les orthodoxes) appréhendent que « les vivants », les hérétiques ne renaissent, les flots de la science dissidente si bien terriblement nommée « la Mer », va frapper l’autel catholique d’un remous nouveau. Et les voilà qui déjà se chuchotent à travers les roches nues du Midi l’ancien mot de passe : « Altri[1] ».
Les juges, les bourreaux, les soldats, les prêtres, se ruent sur cette révolte décriée. Serait-elle vaincue ? Et comment résister à toutes ces forces liguées ? Le sang païen s’anémie dans les campagnes. Jésus est d’ailleurs un redoutable magicien ; l’exorciste a secoué son eau bénite et son latin sur l’arbre, le chien, la mare. Où le pauvre Satan va-t-il se nicher ? Il n’a même plus de doctrine ; s’il avait un livre à lui, un vrai, qui ne soit pas seulement le missel à rebours ? il attend sa Bible, son Évangile, le récit de sa passion et de sa gloire afin qu’à l’instar des autres Messies, il soit immortel même au tombeau. Quel livre, pour des adeptes qui ne sauraient lire ? parbleu, mais un livre d’images, un livre discret, qui ne compromettra pas, un livre à jouer…
Ce livre, un miracle l’apporte. Il semble que le morne Orient se soit attendri, qu’il ait eu pitié de ce Satan son fils… Puisque le pauvre hère n’a plus même la force de retourner dans sa patrie, sa patrie lui envoie des auxiliaires, une armée fraîche avec ces armes incomparables, l’arsenal
- ↑ Lettres combinées, initiales d’une formule demeurée encore dans les traditions populaires du Midi, dont la clef reste à découvrir : Arrego, Lucembourg Templaro, Romana, Imperator.
J’y distingue, mais bien faiblement, le navire Argo, le Temple et peut-être Henri VII, mais qui exactement saura ?