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LA SORCIÈRE

l’homme, où le Verbe s’enveloppa. La femme règne dans l’empire de la chair, parce que l’Esprit la dévaste sans cesse, s’y blottit, profite de ses entrailles pour y devenir vivant. — Dans le décor ladre, exaltée par la gêne et son têtu espoir, elle crée lentement, sûrement, sous l’œil du père ou du mari, qui trop occupé, ne s’indigne guère, songe, pour excuser sa femme, à cette délicate impressivité, n’ose user d’énergie ; il la casserait. Elle parle la nuit, se lève, écrit d’étranges pages, qui semblent ne jaillir ni de ses souvenirs, ni de ses lectures, ni de ses conversations. D’où alors ? Autour d’elle on s’inquiète ; comment croire à des fraudes, on se récrie, on résiste ; puis, d’épouvante, on accepte tout. C’est que l’Invisible devient visible de plus en plus, il commande, il conseille, il investit la maison de sa présence outrecuidante, utile cependant. Il gère les affaires, prophétise, allonge dans la famille moderne l’ombre des vieux dieux. Le mari vient-il à mourir, l’Esprit le remplace, s’installe dans la chambre à coucher qui devient son sanctuaire, se sert même de l’âme du défunt ; tout lui est bon. Désormais, elle a beau être veuve, délaissée, sans âme parente ; Lui est autour d’elle, soufflant dans sa nuque, parlant dans ses meubles, délaçant par jeu autour de son bras le bracelet, posant un baiser à ses yeux qui se ferment, chantant comme un grillon menu dans le foyer où cuit le repas, ou bien, dans le poêle, ronflant un somme vigilant dont elle est bercée. Parfois elle le voit presque complètement, surtout à l’heure de s’endormir, quand les ombres se groupent dans la chambre où la bougie s’éteignit. Ses yeux émergent d’abord, vagues lueurs sur un fond sombre, douloureux, d’un rose morne où chatoie l’enfer. Elledilate ses paupières,

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