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LE SATANISME ET LA MAGIE

gnons esprits, englobés dans une goutte de pluie, ceux qui se flétrissent avec les pétales effeuillés, qui frétillent dans les insectes, volent avec les oiseaux et les nuées, grondent aussi dans les foudres électriques[1]. J’ai un faible pour le sorcier qui comprend ces forçats de l’universel paysage, qui trébuche, craignant à chaque pas de piétiner une âme, qui, fuyant les villes et les gens, s’allie aux bêtes, choisit les plus décriées, devance Hugo en son affection enthousiaste pour le crapaud, réhabilite avant lui Satan, s’allie avec le reptile, manipule l’ordure, sait, avec Paracelse, qu’au fond des matières putréfiées palpite la vie nouvelle : dictame et résurrection.

Il fait le mal, dites-vous ? il est vrai. Il fait le mal, mais avec la simplicité des animaux qui se défendent ; il fait le mal comme tuent les énergies naturelles, en qui réside pourtant la possibilité de toute guérison. Il fait le mal, et il n’a pas toujours tous les torts[2]. Le crime est presque excusable s’il est beau : j’entends par beauté la profondeur désintéressée, l’instinctive colère, la souffrance acceptée comme une exquise pâture amère. Ah ! la résignation muette et furieuse elle défend plus efficacement que les autres armes. Inclinez la tête, baissez l’échine sous le fléau ; obéissez aux coups, l’élasticité du corps meurtri sait renvoyer à l’adversaire victorieux les blessures qu’il donne. Le bâton rebondit, féroce, contre celui qui a frappé ! Le crime, s’il est beau d’ardeur simple, dépasse la médiocre vertu, où barbotent le juge, le bourgeois, la mondaine, le curé, se hisse au-dessus de la société hypo-

  1. Il n’y a pas une chose au monde, pas un brin d herbe sur qui un esprit ne règne. » (Salkat Chadash.)
  2. Voir la 2e partie presque en entier consacrée aux maléfices du sorcier.