Eh ! l’est-on autrement ? Soyez avec souplesse
Flatteur près de la Tante, & tendre avec la Niece,
Grave devant le Frere, & vous ferez du bruit.
Un autre soin, Lisette, occupe mon esprit.
Quel est donc ce Cléon, cet ami de ton Maître ?
C’est un homme, Monsieur, excellent à connoître.
Riche, sur le retour, garçon & sans parens,
Il fait cas de l’esprit, il chérit les talens ;
Et dès qu’il vous verra, je gagerois ma vie
Qu’il va prendre pour vous une estime infinie ;
Avec lui fortement tâchez de vous lier.
Plût au ciel qu’il vous fît un jour son héritier !
Je crains qu’il ne me soit plus nuisible qu’utile,
Le grand empressement qu’il fait voir pour Lucile,
Alarme mon amour.
Vous n’êtes par malheur qu’un cadet de maison.
J’hériterai peut-être.
De quoi sert le savoir ? À quoi bon la naissance,
La figure, l’esprit, les graces, la vertu,
Quand tout cet assemblage est d’argent dépourvu ?
Un véritable amour, quand il est réciproque,
Sait suppléer à tout.
Un amour mutuel, qui ne manque de rien,
Fait le bonheur parfait ; mais quand il est sans bien,
C’est le comble, monsieur, de toutes les misères.