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Page:Boissy-Oeuvres de Théâtre de M. Boissy. Vol.2-1773.djvu/197

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LISETTE, ôtant le portrait qui cache Montval.

Embrassez-le lui-même en propre original.

LUCILE, voyant Montval à ses genoux.

Où suis-je ? juste Ciel ! quel objet ! quelle vue !
La joie & la frayeur me tiennent suspendue.

MONTVAL.

Ah, Lucile !

LUCILE.

Ah, Lucile !Ah, Montval ! Est-ce vous que je vois ?
Est-ce vous que j’entens ?

MONTVAL.

Est-ce vous que j’entens ?Oui, reconnoissez-moi.

LUCILE.

Quoi ! vous êtes vivant ?

MONTVAL.

Quoi ! vous êtes vivant ?Oui, vivant & fidele.

LISETTE.

Pour convaincre vos yeux, touchez, Mademoiselle.

LUCILE.

Mes sens, de la douleur, passent rapidement
À l’excès de la joie & du ravissement.
Un moment arrêtez, souffrez que je respire :
Un si grand bien m’accable, & je ne puis rien dire.

MONTVAL.

Ô jour ! ô jour heureux ! ô moment enchanteur !
Qui répare trois ans de peine & de malheur !
Mon bonheur est si grand aussi bien que ma gloire,
Que j’en suis étonné, que j’ai peine à le croire :
Vous m’aimez !

LUCILE.

Vous m’aimez !Pour juger de ma sincere ardeur,
Regardez-moi, Montval, & voyez ma pâleur ;
Voyez le triste état où vous m’avez réduite :
Sur mon front abattu ma tendresse est écrite ;
Consultez ce Portrait, l’ouvrage de l’amour ;
Où vos traits et ma flamme éclatent tour à tour.
Interrogez les pleurs que je viens de répandre,