un peu, car je suis trempé et voudrais bien être au logis. »
Mais Jean, qui feignit de ne pas l’avoir entendu :
« Sire, dit-il, chassons un peu par ce bois.
— Je n’ai pas envie de rire, » dit l’Anglais.
Et ils chevauchèrent tant qu’ils arrivèrent chacun en leur logis, où les Anglais commencèrent à gémir sur leurs parents qui s’étaient noyés ; mais on allait à la noce, et la mélancolie ne dura pas.
Un autre jour, aux champs, le roi anglais, qui avait oublié sa peine, dit à Jean de Paris en chevauchant : « Mon ami, dites-nous, je vous en prie, pour quelle raison vous venez en Espagne.
— Sire, dit Jean, je vous le dirai volontiers. Et voici pourquoi. Il y a environ quinze ans de cela, feu mon père, à qui Dieu fasse grâce de tous ses péchés, vint chasser en ce pays, et, quand il partit, tendit un lacet à une perdrix ; je viens joyeusement voir si la perdrix est prise.
— Vraiment ! dit en riant le roi d’Angleterre ; vous êtes un maître chasseur qui venez si loin chasser une perdrix. Si elle a été prise, elle doit être depuis longtemps gâtée et mangée aux vers.
— Vous ne savez pas, dit Jean, que les perdrix de ce pays ne ressemblent pas aux autres ; celles d’ici se conservent mieux. »
Les Anglais, qui n’entendaient pas à quelle fin il disait ces propos, se mirent à rire. Les uns pensaient