Page:Bonafon - Les Confidences d une jolie femme.djvu/175

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„ Cette action, la véhémence de mes paroles, le tremblement de tout mon corps atterrerent le Chevalier ; il ſe laiſſa tomber ſur un ſiege, le viſage couvert de ſes mains, ſans me répondre, ſans même faire attention que j’étois toujours à ſes pieds.

„ Tu ne me dis rien ! repris-je, étonnée de ſon ſilence. Murville… mon cher Murville, douterois-tu de ma tendreſſe ? ou me ferois-tu un crime de vouloir me conſerver digne de toi ?… Sois juſte, ſois généreux… Obtiens-moi de ma mere, & tu verras ton heureuſe femme voler au-devant de tes moindres deſirs… Tu la verras ne chérir, ne ſouhaiter la durée de ſa vie, que pour l’employer à t’adorer.

„ En parlant ainſi, je m’efforçois de déplacer ſes mains… Il ne me les abandonna, qu’après une aſſez longue réſiſtance : eh, que devins-je ! à l’aſpect de ſon abattement, de ſes yeux humides, qu’il baiſſoit avec toute l’expreſſion de la douleur ? Mon cœur ſe déchira… Deux fois j’ouvris la bouche pour démentir l’acte de courage que je venois de faire… Ciel ! vous me préſervâtes de ce comble d’égarement ! Vous ne voulûtes pas, qu’outre les chagrins dont j’allois être