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Canadiennes d’hier

que et charitable, on n’en parle pas ; il est au premier rang de ceux qui donnent bonne mesure en vendant leurs produits ; il paie sa dîme sans se faire tirer l’oreille et, ce qui est encore plus rare, en temps d’élections, on n’a pas besoin de le réchauffer pour le faire voter. Il y a eu un temps, d’ailleurs, qu’il se réchauffait bien tout seul ; sans être un ivrogne, il ne « crachait pas dedans », comme on dit. Mais, depuis le terrible accident arrivé à son fils Pierre, il est sobre comme un juge (comme un juge sobre) et vous n’aurez pas besoin de porter la croix de tempérance dans sa chambre pour le faire persévérer dans ses bonnes résolutions.

Notre beau gars, lui, fait du sucre à profusion par le temps qui court. Il paraît que les érables coulent comme dans les bonnes années. Tante Louise a donné cette intéressante nouvelle à Régina, dimanche, au sortir de la messe.

Elle a bien hâte, tante Louise, que « Petit » revienne de la sucrerie ; il est sujet à s’enrhumer et die craint toujours pour sa santé. Heureusement, dit-elle, qu’il a un bon engagé. Daniel Robichaud, c’est tout ce qu’il y a de plus fiable et de plus dévoué. Mais, quand il y a de la presse et qu’ils sont obligés de faire bouillir la nuit pour ne pas perdre d’eau d’érable, il faut bien que Jean veille a son tour. Ces cabanes à sucre, on voit le jour à travers, le vent y pénètre facilement et il y a de la boucane ! Dire que vous seriez prête à passer des années, avec le mari de votre choix, dans de telles conditions, vous êtes vraiment héroïque, ma petite fille. Vous méritez bien que votre gracieuse image

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