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Canadiennes d’hier

guerre. L’année dernière, la paix étant signée, l’occasion s’est présentée de s’en « débarrasser » à bonnes conditions. J’étais à Constantinople, on ne savait pas quand j’en reviendrais, si même j’en reviendrais ; j’avais autorisé mon beau-frère d’agir en mon nom ; il a fait, m’a-t-il dit, comme si c’était pour lui. Il ne me restait plus qu’à le remercier de ses bons offices. Me voilà plus riche d’argent et plus pauvre de souvenirs, plus déracinée que je ne croyais. Mes vieux meubles n’ont pas été compris dans le marché — c’est encore beau — ils m’attendent à Québec, en magasin. Je verrai plus tard à en disposer ; pour l’instant, je ne songe qu’à me rendre le plus vite possible à St-Jean-Port-Joli.

Hélène ne peut pas dire au juste quand elle occupera sa villa de Valois. Elle ne se résigne pas à y passer tout l’été et doit partir, la semaine prochaine, en auto, avec ses fils, pour de courtes visites aux principales villes d’eaux des côtes de l’Atlantique. Si elle en trouve une à son gré, elle s’y installera pour quelques semaines. Gustave semble croire qu’elle ne se fixera nulle part. Il connaît sa phobie du peuple de Dieu et sait que la colonie montréalaise de cette race privilégiée affectionne particulièrement les plages américaines.

Ma sœur m’invite à faire partie de sa suite ; j’ai prétexté un grand besoin de repos pour refuser de l’accompagner. Je peux bien vous le dire, Régina, j’ai vu bien du pays depuis deux ans. Sans parler de Constantinople, j’ai visité la Côte d’Azur, la Côte d’Argent, la Côte d’Émeraude ; j’ai vu Nice Biarritz, Paramé, pour ne nommer que ces plages.

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