Page:Bonenfant - Canadiennes d'hier, lettres familières, 1941.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Canadiennes d’hier

tasse de bouillon, corse d’une croûte de pain séché : mais vous n’auriez pas eu le temps de manger beaucoup plus si votre régime l’avait permis, vous étiez trop empressée à servir vos convives. Et vos gens sont à votre image ; comme vous, ils se donnent trop de mal ; vous raffinez sur la politesse, si simplement d’ailleurs que cela paraît tout naturel. C’est quand on y réfléchit, qu’on se rend compte de l’effort physique que demande une telle façon d’exercer l’hospitalité ; on est alors dans la confusion d’avoir accepté tant de prévenances comme si elles nous étaient dues.

Tout en vous prodiguant pour mettre tout le monde à l’aise, chère gros’maman, vous demeurez, pour me servir de votre expression, reine et maîtresse dans votre maison et vous savez régner sur votre petit monde. Quel joli respect vous inspirez à votre entourage ! On le retrouve jusque dans les gronderies affectueuses. Comme vous avez su, de même, dissiper l’embarras causé par la présence, au milieu de vos familiers, de la demoiselle de Québec ! La dite demoiselle était elle-même fort intimidée. Un mot, celui qu’il fallait, un geste affectueux ont suffi à me faire reconnaître citoyenne de St-Jean-Port-Joli. Tous vos invités se sont empressés de dire qu’ils avaient déjà vu mes parents ou qu’ils en avaient entendu parler. La glace était rompue. Il est vrai que vous avez été secondée puissamment par M. Dumas. Ses bonnes histoires n’ont pas peu contribué à rétablir l’atmosphère habituelle ; elles ont fait rire même M. Leclerc.

60