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Canadiennes d’hier

Je ne pourrai pas écrire longuement, moi non plus, d’ici quelques jours. En ce moment, je suis tranquille parce que tout le monde est à vêpres, mais, je serai probablement dérangée par quelque visite. À la ville, il ne s’en fait plus beaucoup, je crois, de visites du jour de l’an. À la campagne, elles sont encore en honneur et la fête porte octave. Le jour même, elles commencent de bonne heure le matin. Il n’était pas sept heures, cette année, quand les premiers enfants du voisinage sont venus chercher leurs étrennes, le sac d’école au bras. De mon lit, je les ai vus arriver en sautant dans les bancs de neige. Nous étions prêtes à soutenir le choc : il y avait une ample provision de cornets de bonbons sur le piano, sur la table de la cuisine, un grand cabaret comble de croquignoles et des pommes en veux-tu, en voilà.

Alice et Régina, qui m’épargnent la fatigue autant que possible, les ont reçus et expédiés vite et dru. J’entendais vaguement : « Fermez la porte secouez vos pieds… faites pas de bruit… bonne et heureuse année… paradis à la fin de vos jours… vous pareillement… merci mam’zelle » puis claquer les gros baisers de mes filles sur les joues fraîches des tout petits. Je les ai vus partir du même train pour aller chez le Dr Simart, le notaire Dufour, madame Rivet, etc. et finir leur tournée par le presbytère où M. le curé leur donne des pièces blanches parce que, arrivés là, leurs sacs sont pleins à déborder.

Après la grand’messe, nos cousins, nos amis à divers titres et les gros habitants sont venus, à

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