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Canadiennes d’hier

leur tour, nous « la » souhaiter bonne et heureuse. Mon Élie est marguillier, conseiller municipal, secrétaire du Conseil ; c’est lui qui a fait les honneurs de la maison. Dans la petite salle, on avait mis une carafe de vin sur la table et des assiettées de croquignoles. Chez moi, on n’offre rien qui « gratte ». J’ai toujours, à la maison, une bouteille de cognac, par mesure de précaution, mais elle dure un an et, encore, j’en donne une bonne partie aux voisins pour les malades. Élie passe à la ronde sa blague à tabac, conte des histoires, dit des blagues. On les enferme pour ne pas étouffer dans la fumée ; seuls les éclats de rire passent à travers les portes. Jean, qui ne fume pas, s’est esquivé pour venir me demander si Mlle Carrière s’était rendue à Québec sans accident. Il craint que vous n’ayez attrapé un rhume pendant votre promenade avec lui car le thermomètre marquait 20° sous zéro vers le soir. Je l’ai rassuré et il n’a pas été question de corvée. Quand il m’a remerciée de lui avoir fourni l’occasion de passer un agréable après-midi, un éclair d’été a illuminé ses yeux d’hiver et un doux, doux, doux sourire a souligné sa moustache soyeuse. C’est beau la jeunesse !

Après les vêpres, ma fille, nouvelle affluence de visiteurs : le notaire D. et sa femme, le Dr S. avec la sienne, M. le vicaire, deux vieilles cousines, d’autres encore. Alice a fait du café et elle a sorti ses dernières réserves : les biscuits fins, les macarons et les bonbons de chez Winfield.

Tout de suite après le souper, nous avons dit notre chapelet, toutes lumières éteintes, en nous

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