Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/19

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
CHARLOT S’AMUSE

— Pas moyen de filer à la cloche de bois dans cette sacrée cambuse ! grogna-t-il, furieux de n’avoir pas reconnu l’entrée plus tôt ; mais, soudain, il s’arrêta, muet. Il songeait que la femme de son ami devait l’attendre en proie à toutes les transes. Comment allait-il lui raconter le malheur ? Pour sûr, elle ne prendrait pas la chose comme le gosse ; il faudrait lui avouer tout, les recherches inutiles, l’improbabilité même du repêchage du cadavre ; et un grand frisson lui secoua l’échine. Il pensait à l’agonie du gazier et se représentait son pauvre Duclos surpris par la crue subite de l’égout, en un clin d’œil gonflé par l’orageuse pluie d’avril, se débattant et voyant monter l’eau, tandis qu’il se cramponnait, hurlant et hagard, aux conduites de plomb pliant sous son poids… Oh ! la cruelle et affolante agonie !

L’homme recula, pris de peur, et s’accota, éperdu, au magasin du fruitier, contre le porche. Il cherchait ses mots, préparant le discours qu’il ferait à la veuve, et se débattait, gêné maintenant par l’enfant, contre la vision nette de cette mort horrible, atroce, à dix pieds sous le pavé. D’épouvantables histoires lui revenaient qu’il avait lues dans le Petit Journal, entre deux parties de zanzibar, sur le zinc. C’était une gamine revenant de l’école qui, en