Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/406

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Je lui jurai… Elle me baisa vingt fois sur le cœur. Je n’exigeai pas d’elle le même serment, elle m’aurait dit : — Sur l’heure, et le boisseau de mes dégoûts n’était pas comble : une épingle m’attachait encore à la vie. Je la savais résolue, elle caressait ce projet depuis bien long-temps ; pensant l’exécuter d’instant en instant, elle portait sur elle un testament de ses dernières volontés, afin qu’on n’accusât personne de son assassinat. J’ai balancé long-temps, j’ai été long-temps indécis si j’irais lui découvrir ma volonté tardive, et lui dire : — Flava, je suis prêt enfin, lève-toi, viens et tuons-nous.

J’aurais tant de plaisir à périr avec elle, elle en est bien digne !… Mais, cependant, je ne le veux pas, je ne le ferai pas ; le monde est si stupide, il dirait que nous nous sommes… que je me suis frappé par amour. Non, non, je ne le veux pas ; le monde est si stupide, il ne peut croire que la vie soit un fardeau dont le robuste se décharge ; il ne peut croire à la soif de l’anéantissement, ni qu’on répugne à l’existence ; il faut qu’il matérialise tout, cause et effet, une idée pour lui n’a rien de palpable, il faut qu’il jauge et cube tout, jusqu’à son Dieu ! Quand il