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Et sur ces murs maudits, de sang bientôt couverts.
Verse tous tes rayons, flambeau de l’univers !
— Mais c’est l’heure où devraient s’effacer les étoiles….
D’où vient que si longtemps le ciel garde ses voiles ?
Qui peut donc du soleil empêcher le retour ?
Moi sans doute ! C’est bien : rendons le monde au jour !

(L’ombre de Thyeste s’éloigne ; le jour paraît. — Entre le chœur des femmes d’Argos.)


Scène II

CHŒUR DES FEMMES D’ARGOS.
I


Ô Fortune, qui trompes même
Les plus puissants et les meilleurs,
Tu places la grandeur suprême
Près d’un gouffre couvert de fleurs ;
Ces maîtres du sceptre et du glaive,
Le sort les brise ou les relève,
Un orage habite leur sein ;
Des révolutions sans nombre
Les assiégent d’un flot plus sombre
Que les vagues du Pont-Euxin !


II


 
Leur sommeil tourmenté prolonge
Leurs alarmes ou leurs fureurs ;
Ils sont à la fois, même en songe,
Fiers et tremblants de nos terreurs ;
Leur pouvoir qui nous émerveille,
Un crime l’a fondé la veille,
Un crime l’abattra demain ;
Pudeur, justice, tout s’efface,
Et l’on voit régner en leur place
Bellone à la sanglante main !