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les principales recommandations auprès d’elle avaient été sa fortune et sa jolie figure. Elle inspirait pourtant alors une passion profonde à l’héritier d’une des nobles familles qu’elle fréquentait ; mais elle n’y avait répondu que par la défiance. Elle avait douté d’elle-même et de celui qui lui offrait son amour : une vague jalousie, dont une femme mariée était l’objet, l’avait égarée, et elle avait négligé de saisir son bonheur, dupe d’une de ces susceptibilités outrées qui prennent leurs sources dans les naïves pudeurs de la jeunesse.

Adorée de son mari, dont elle-même était vivement éprise, pourquoi Mathilde ne fut-elle pas heureuse ? — Hélas ! elle avait bien vite découvert ce que l’enthousiasme lui avait dérobé au premier aspect : la vulgarité physique et morale de ce joli garçon. Alors son imagination déçue avait complètement refroidi ses sens. Inquiète, mélancolique, aspirante, elle avait réalisé, dix ans avant sa création littéraire, ce type de la femme incomprise, touchant d’abord, ridicule ensuite, comme toutes les choses qui deviennent la prétention des médiocrités.

Mathilde avait-elle toujours été fidèle à son