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dans les réflexions de sa sœur que ce qui correspondait au trouble de sa conscience. C’étaient les scrupules que témoignait Adrienne à l’égard de Phèdre. Elle s’accusa de trop bien comprendre ce personnage. Eh quoi ! portait-elle dans son sein ces flammes de la passion qui absorbent la pudeur comme les rayons du soleil boivent les vapeurs matinales ?

Elle alla relire les plaintes de l’amante d’Hippolyte ; elle voulait s’interroger, surprendre aussi sa délicatesse en alarmes. Elle ne sentit qu’un entraînement d’âme, un attendrissement sur elle-même qui semblait détendre l’effort douloureux des luttes qu’elle soutenait. Mais cet attendrissement n’alanguissait pas ses forces : il mêlait à ses souffrances une sorte de ravissement de martyre. Elle comprit alors comment, en nous offrant l’image sympathique de nos épreuves, les poëtes, ces grands consolateurs du genre humain, viennent en aide à la liberté combattue.

Madame de Nerville répondit à Adrienne d’un ton persifleur qui émoussait la réplique et ne donnait à l’approbation que la valeur d’une plaisanterie.

Adrienne s’était bien promis de garder avec