Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/245

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impatience qui s’accroissait d’instants en instants. Tantôt il marchait, allant et venant, pressé par l’aiguillon de l’inquiétude ; tantôt il demeurait immobile, replié sur lui-même, concentré, mais appliqué surtout à écouter tous les bruits du dehors, comme s’il était certain que le salut ne viendrait que de là. Enfin, on entendit des pas légers sur l’escalier, et Adrienne entra dans la chambre.

— Où étiez-vous ? lui dit Félicien, avec un ton de brusquerie farouche qui ne lui avait jamais échappé, même au plus fort de leurs dissensions.

Elle ne répondit pas : elle venait de l’église achever une neuvaine.

— Tout à l’heure on avait besoin de vous, et vous n’étiez pas là. Ne quittez plus cette chambre. J’ai mes superstitions aussi, moi, peut-être, et je crois que la présence d’une mère peut défendre son enfant contre la mort.

Adrienne s’approcha du petit Raoul. Elle le vit les lèvres entr’ouvertes, les joues livides, les prunelles noyées sous ses molles paupières. Saisie d’effroi et blessée au cœur par les paroles de son mari, elle se sentit près de chanceler ; mais à force de courage, elle reprit vie. Si elle