Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/258

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Enfin on jouissait de ce que la vie de province a de plus doux : un enchaînement de relations qui fait que le plaisir ne manque jamais de lendemain, et que le besoin, comme la joie de se revoir, s’accroît tous les jours.

Pour Félicien surtout, ces satisfactions de l’amitié étaient si attrayantes, si inattendues que, chassant les avertissements importuns de son expérience, il se persuadait qu’il saurait toujours s’en contenter. Mais il y avait des instants où, si quelque chose touchait plus directement l’âme de Cécile, un retentissement éclatait tout à coup qui trahissait la profondeur de sa passion. Depuis qu’il était encouragé par la présence de ses deux amies, Félicien ne se privait plus du plaisir d’exprimer ses opinions, même chez madame Milbert. Toujours sur ses gardes cependant à l’égard de ses anciens contradicteurs, quand il en avait dit assez pour persuader celles-là seules auxquelles sa pensée s’adressait, il faisait une retraite honorable. À la grande surprise de tous, il arriva plusieurs fois à Cécile de relever le drapeau qu’il abandonnait. Elle le défendait avec une simplicité véhémente qui frappait tous les auditeurs. Madame Milbert et Adrienne avaient