Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/327

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pourrait la consoler de son délaissement. Quand Adrienne eut recouvré la pleine jouissance de sa santé et de ses facultés, il annonça une absence. Elle n’y fit point d’opposition ; mais au moment du départ, elle le regardait avec de grands yeux inquiets :

— Ne crains rien, lui dit-il, je reviendrai bientôt.

— Je le sais, répondit-elle, le dévouement que vous m’avez montré est le plus fort des engagements.

Félicien était embarrassé : il sentait la vérité des paroles d’Adrienne, et pourtant revoir Cécile, jouir de la douce expansion de sa tendresse, c’était toujours le bonheur pour lui. Les deux amants le retrouvèrent enfin, ce bonheur si longtemps attendu ; mais ce fut un bonheur blessé, plus douloureux que le malheur même. Pendant cette longue suspension de leur entraînement, ils s’étaient déshabitués de la passion qui brave tout ; aussi leurs paroles étaient hésitantes, leur abandon contraint, et les révélations de leur confiance pénibles.

Enfin Cécile, à travers une explosion de désespoir, laissa échapper le secret de son cœur ; pendant sa longue attente, le fruit empoisonné