Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/66

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saut d’une demi-douzaine de petites voix montées au suraigu, éraillées par la colère et qui vous lancent l’anathème avec l’autorité inflexible de la stupidité et de l’entêtement.

Félicien ne trouvait encore là de meilleur parti à prendre, pour défendre son opinion, que de se renfermer dans la dignité du silence. Un jeune avocat, qui le voyait, à la suite d’une des sorties de ces dames, effectuer cette calme retraite, vint lui dire en manière de consolation et avec un air de mystère qui annonçait la confidence d’une vérité hardie : « Je crois que c’est pousser un peu trop loin le scrupule que d’exiger que la peinture des passions soit totalement bannie des œuvres d’imagination. Mais pourquoi ne ferait-on pas toutes les héroïnes vertueuses ? C’est là ce que je voudrais : que le dénoûment les montrât toujours triomphantes des tentations auxquelles elles ont été exposées. Il me semble que l’intérêt des livres n’y perdrait rien, et ce serait d’un bon effet pour les lectrices. »

Ce compromis parut si merveilleux à Félicien qu’il prit l’engagement avec lui-même de n’en point entendre davantage. Aussi, quelque adresse qu’on y mît, ne put-on désormais l’en-