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d’indépendance. Mais, comme si le hasard eût voulu lui fournir une prompte occasion d’expérimenter toutes les sympathies de goût et d’intelligence que pouvait lui promettre l’intimité avec Adrienne, madame Milbert fut obligée de s’absenter pour quinze jours. Le premier dimanche, le mauvais temps ayant retenu les deux époux à la maison, il passèrent la plus languissante soirée de tête-à-tête qu’il soit possible d’imaginer. Félicien s’étonnait lui-même de ne savoir quoi mettre à la place de son ennui habituel. La lecture ? Jamais il n’avait vu Adrienne ouvrir un livre, et il avait déjà bien des raisons de croire qu’elle s’interdisait cette distraction ; peut-être même ne lui était-elle point agréable. La promenade ? Il pleuvait. La conversation ? Ils n’avaient pas deux idées qui leur fussent communes, hors celles qui s’appliquaient à quelques détails d’intérieur. Ce qui augmentait la difficulté, c’est qu’Adrienne n’avait pas, comme tous les soirs, la ressource de son aiguille, parce que, le jour dominical, le travail est interdit. Enfin, Félicien ayant pris du papier et un crayon, elle lui fit copier des dessins de broderie sur un journal de modes. Ils gagnèrent ainsi dix heures