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charmante pièce convient à tout le monde : sa composition est assez savante pour intéresser les connaisseurs, et ses ravissantes et faciles mélodies enchantent l’oreille la moins exercée. D’ailleurs, le patriotisme des Rouennais l’a adoptée tout particulièrement ; on peut la jouer six jours sur sept sans qu’ils s’en plaignent, ni que la salle soit vide ; c’est la suprême ressource des directeurs dans l’embarras.

Les deux époux, après avoir passé d’assez mauvaise humeur une partie de la soirée, la terminèrent, grâce à la musique de Boïeldieu, très-agréablement. Mais c’était la première fois qu’Adrienne faisait si bonne contenance au théâtre. Elle craignait les légèretés des œuvres amusantes, et la musique ou la littérature sérieuses lui causaient un mortel ennui parce que son intelligence n’y était pas préparée. C’était toujours alors pour elle l’occasion de regretter les réunions de sa société : « Oh ! que je préfère bien, pensait-elle, ces petites soirées de thé, où l’on cause entre dames, tout en travaillant ou en jouant ; oui, même chez les personnes où la réception est plus cérémonieuse, et où l’on est obligée, ce que je n’aime pas, de faire des toilettes décolletées ! »