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par enchantement et s’empressèrent de déclarer, sur la proposition de M. Laffitte et de M. Casimir Périer, que, trouvant leurs mandats insuffisans devant la grandeur des circonstances ils en appelaient à la nation et invitaient le lieutenant-général du royaume à convoquer une assemblée générale, ce que M. le duc d’Orléans se hâta de faire avec autant d’empressement que de joie.

— Tout homme payant une contribution équivalant à cinq jours de travail fut donc invité à se rendre dans sa commune pour élire des électeurs qui se réunirent eux-mêmes, huit jours après, aux chefs-lieux d’arrondissement pour élire les députés. Ces élections se firent dans le plus grand ordre, et l’assemblée générale composée de 918 membres investis de mandats spéciaux, tint sa première séance le 25 août suivant, jour de la Saint-Louis. Le choix de ce jour était une attention délicate et significative de M. le duc d’Orléans.

Après d’importans débats qui durèrent plusieurs jours et dans lesquels brillèrent MM. Berryer, Laffitte, Royer Collard, Dupin Périer, Barrot, Mauguin, Lafayette et tant d’autres, il fut unanimement reconnu que l’origine du mal se trouvait dans l’importation en France des idées anglaises. On se souvint alors du mot de M. de Pradt, qui avait conseillé, en 1814, de convoquer les états-généraux, et on déplora la funeste influence exercée à cette époque par M. de Talleyrand, qui avait fait octroyer une charte quasi-anglaise. On repoussa tout d’une voix la charte de 1814, qui n’était qu’un piège où tout le monde fut pris, depuis le plus grand jusqu’au plus petit. Voire même que j’y ai été pris comme les autres, tout enfant que j’étais ; mais je n’y tomberais plus, tout candide que je suis encore !

Personne n’a oublié la solennelle séance dans laquelle l’assemblée unanime proclama Henri V roi de France et fixa la majorité à quinze ans. Elle investit en même temps Mgr le duc d’Orléans du gouvernement du royaume, et tout le monde admira dans ces grandes circonstances la haute sagesse de ce prince, son noble caractère et sa fidélité décidée. Il refusa le titre de régent et accepta celui de président du conseil de régence, qu’il composa des plus grandes illustrations du pays. Il ne se réserva à lui seul que le droit de faire grâce, et refusa noblement toute liste civile, ce qui n’étonna personne. Il nomma M. de Villèle premier ministre, ce qui rassura tout le monde.

Dès le lendemain, l’assemblée déchira les traités de 1815, aux acclamations de la France entière.

En conséquence de ce grand acte national, M. le duc d’Orléans prit le commandement de l’armée, et envahit la Belgique, qui se sépara avec joie de la Hollande, et redevint française sous le titre de province de Belgique. Le prince s’avança sur la ligne du Rhin. Les populations venaient au-devant de lui, les habitans ouvrirent les portes des villes, et les garnisons étrangères furent renvoyées honorablement avec armes et bagages. En moins de trois mois et sans combat, la France reconquit ses limites naturelles au milieu d’un enthousiasme qui tenait du délire ! — Vous voyez que l’histoire véritable vaut bien le roman révolutionnaire de mes collègues les publicistes !

C’est alors que parut cette sainte et énergique déclaration que l’assemblée nationale fit signifier à toutes les puissances du globe. Elle proclamait l’indépendance de la France, sa prise de possession de ses véritables limites et sa résolution de s’abstenir de toute autre conquête continentale. — L’Europe se troubla et fit mine d’armer. Mais l’Angleterre était embarrassée dans l’Inde, la Russie avait la Pologne à contenir, et l’Autriche l’Italie à conserver ! Cha-