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Page:Bossard - Gilles de Rais dit Barbe-Bleue, 1886.djvu/194

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SACRIFICES HUMAINS.

sévérité que les pouvoirs établis employèrent à les poursuivre[1].

Ces crimes honteux n’étaient cependant que le prélude de crimes encore plus infâmes, par lesquels le fidèle se préparait au culte du maître. Dieu, qui est tout pureté et tout amour, veut que l’homme l’honore par un culte pur et tendre, car il ne se communique qu’aux chastes et aux aimants. Le démon, au contraire, dont la révolte est tout haine et perversion, exige de ses fidèles deux choses contraires à la pureté et à l’amour : la débauche et la cruauté. C’est ce que l’on remarque dans toutes les religions païennes, et il suffit d’ouvrir les procès de Gilles de Rais, pour découvrir, dans les aveux des coupables, les traces d’une corruption et d’une cruauté effrayantes. Les procès de Gilles de Rais servent de preuves aux récits des historiens et des moralistes. Il est à remarquer, en effet, que la plupart des évocations qui s’y trouvent signalées, sont précédées de débauches et de cruautés sans nom. Nous en parlerons plus au long dans le chapitre suivant ; mais il importe de le remarquer dès à présent : l’appel au démon, à Tiffauges, à Machecoul, à Bourgneuf, à Josselin, est presque toujours préparé par des actes d’une corruption et d’une cruauté telles que l’antiquité religieuse et païenne, avec ses Sodomes et ses Éleusis, ses Néron et ses Caius, n’offre rien de semblable à l’imagination. La vie et le procès de Gilles de Rais suffisent à démontrer à quels excès pouvait pousser le culte des démons, et de quels dangers la sorcellerie menaçait la société religieuse et poli-

  1. « Charlemagne édicta les peines les plus sévères contre ceux qui osaient manger de la chair humaine et contre ceux qui se livraient à la magie. Les deux crimes se confondaient sans doute, et l’on prétendait, par d’horribles sacrifices, se rendre propices les esprits infernaux. » Revue des Deux-Mondes, 15 novembre 1884, l’Anthropophagie et les sacrifices humains, par M. le marquis de Nadaillac, membre de l’Institut. La seule lecture de cet intéressant travail, auquel on désirerait peut-être une conclusion moins pessimiste, prouve que le culte des démons, plus que toutes les autres causes, a conduit aux sacrifices humains et aux horreurs qui les accompagnent ; et c’est une opinion que M. le marquis de Nadaillac nous a émise de vive voix.