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Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/163

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de nos peres, le Dieu d’Abraham, le Dieu dont Moïse nous a écrit les merveilles, n’a pas seulement arrangé le monde ; il l’a fait tout entier dans sa matiere et dans sa forme. Avant qu’il eust donné l’estre, rien ne l’avoit que luy seul. Il nous est representé comme celuy qui fait tout, et qui fait tout par sa parole, tant à cause qu’il fait tout par raison, qu’à cause qu’il fait tout sans peine, et que pour faire de si grands ouvrages il ne luy en couste qu’un seul mot, c’est-à-dire qu’il ne luy en couste que de le vouloir.

Et pour suivre l’histoire de la création, puis que nous l’avons commencée, Moïse nous a enseigné que ce puissant architecte, à qui les choses coustent si peu, a voulu les faire à plusieurs reprises, et créer l’univers en six jours, pour montrer qu’il n’agit pas avec une necessité, ou par une impetuosité aveugle comme se le sont imaginé quelques philosophes. Le soleil jette d’un seul coup, sans se retenir, tout ce qu’il a de rayons : mais Dieu, qui agit par intelligence et avec une souveraine liberté, applique sa vertu où il luy plaist, et autant qu’il luy plaist : et comme en faisant le monde par sa parole, il montre que rien ne le peine ; en le faisant à plusieurs reprises, il fait voir qu’il est le maistre de sa matiere, de son action, de toute son entreprise, et qu’il n’a en agissant d’autre regle que sa volonté toûjours droite par elle-mesme.